LA MORT D' UN CHEF

Publié le par Michèle Demain

                                        La mort d' un chef, dans un village, est un élément perturbateur, qui laisse pour un temps les villageois, en quelque sorte " orphelins" et génère de nombreux problèmes, tant sa succession est difficile à établir.
                                        Midi !!!!. Le soleil accablant de la grande saison des pluies pose une chappe de plomb et endort le village. Une seule case, celle du chef, Noraogo, est quelque peu bruyante. On y parle avec des voies étouffées par l' angoisse, il s' en échappe quelques gémissements.
                                         Assis sur une natte, le chef très affaibli, est soutenu par une de ses femmes placée derrière lui, les jambes étendues à droite et à gauche. La tête dodelinante, car fatiguée ,du chef est appuyée sur la poitrine de la femme. Il respire avec beaucoup de difficulté, l' atmosphère étouffante de la case remplie de monde, ne lui octroie que très peu d' air.On peut difficilement distinguer sa silhouette, dans un coin obscur, mais on entend sa respiration bruyante et saccadée, la poitrine mue par des soubre-sauts alarmants, on distingue, malgré tout, la lueur de ses yeux brillants de fièvre.
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                                                       LE  CHEF, DEJA  TRES  AFFAIBLI
                                                      Plusieurs fétiches ont été essayés, ne laissant au bout du compte, que très peu d' espoir, Le sorcier NONKHO, revêtu des attributs de sa fonction, en de telles occasions, a fait appel à toute sa science, aspersion d' eau chaude mêlée de feuilles et d' écorces, pommades mystérieuses frottées sur son corps amaigri, infusions de racines, choisies secrètement, poudres " magiques", mêlées à de l' igname pilé. Toute la science du grand sorcier a été sollicitée. Enfin, NONKHO a tué un poulet et pratiqué sur le corps de NORAOGO, l' aspersion du sang, puis hier, il a tenté l' action de la dernière chance, égorgé un mouton et a pratiqué le même rite. Mais il semble bien que l' énorme poids qui écrase la poitrine de NORAOGO, le chef vénéré, respecté et craint, ne s' est pas allégé et que son corps tout entier, brûlant de fièvre, devient de plus en plus faible, il stagne dans la case, une odeur âcre, qui ressemble à celle de la mort.
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LE  GRAND  SORCIER, DERNIERE  CHANCE
                                               En quelques jours, la maladie a fait d' effrayants progrès et dans ce corps meurtri, la faiblesse s' installe, prenant de plus en plus de place. Les femmes de NORAOGO, angoissées , sont là, accroupies, à même le sol, repoussant la faim et le sommeil. C' est à peine,si elles ont quitté la case, un moment pour aller cuire le repas des fils du chef. Pendant plusieurs nuits, elles n' ont pas dormi.
                                               Le soleil, lui, ne connait pas de veille et passe peu à peu sur le village, les ombres s' étirent sur le sol, les rayons arrivent, filtrés par la forêt, perdant ainsi de leur vigueur, offrant un peu de répît. Le jour s' avance vers la nuit.
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                                                     D' AUTRES  FEMMES, DANS  L' ANGOISSE
                                                   NORAOGO est toujours haletant et fièvreux, il lutte pour retenir son dernier souffle de vie. La lumière devient moins éblouissante, la chaleur s' appaise, le village se réveille et la rue retrouve un semblant de vie et s' anime quelque peu.
                                                   La nuit envahissante et redoutable gagne peu à peu son domaine, L' appréhension de l' inconnu, hélas trop connu, de l' incontournable, touture tous les coeurs. Les esprits, en lutte avec le sorcier,sont là, certains de remporter la victoire, déterminés à voler l' esprit de NORAOGO. Que va t ' il se passer cette nuit, chacun le devine sans oser prononcer les mots.
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                                              LE  VILLAGE, DANS L' ATTENTE
                                   Cette trop longue nuit, s' écoule lentement sur le village, de nouveau endormi. NORAOGO parait de plus en plus mal. Le froid de la mort sournoise gagne ses pieds et ses mains, qui se glacent peu à peu, la tête a besoin d' être soutenue, la vie ne la porte plus. Il ne parle plus, même plus un souffle, ni un râle, il n' entend plus le chant de la vie, ses yeux ternes et peu à peu vitreux ,maintenant, sans lueur, la poitrine si fatiguée se soulève plus lentement, comme retenue par un poids énorme. Les femmes et les fils du chef, sans même se concerter,savent bien que la fin approche et que rien n'y fera.

                                            Vers le matin, la respiration s' arrête tout à fait. NORAOGO a quitté ce monde, dans un dernier souffle, sans voir se lever, à nouveau, le jour.
                                                          LE  CHEF  EST  MORT  !!!!!
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G
Et oui, Michèle: il faut me pousser du coude, car je ne tiens pas de liste, et en plus, je bosse, en ce moment, alors le temps tiraille de tous les côté. <br /> Et je suis bien contente que tu sois passée me secouer: ton billet se lit comme les pages d'un livre que l'on aime. Sauf que là, c'est la vraie vie. Avec la vraie mort.<br /> Une telle perte doit être un tremblement de terre dans un village comme celui-ci.<br /> Forcément, tu nous donnes envie de connaitre la suite et Zara pose déjà des questions. J'en ai plein d'autres.<br /> Comment s'organise la cérémonie? Le deuil du village? Combien de temps restent t-ils sans berger? Le groupe des anciens prend-il le relais? T'as t-on tenue à l'écart ou as tu participé aux préparatifs (j'imagine qu'il y a eu une réunion et que, peut-être, d'autres chefs de village sont venus lui rendre hommage?) <br /> Je ne connais pas l'Afrique, tu sais...<br /> <br /> Bonne soirée, Michèle!<br /> Gum
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Z
et comment font ils maitenant? C'est le fils ainé qui devient chef? c'est pas election? La mort est triste, mais ton article est passionnant! <br /> Non, je ne te snobbe pas du tout ma chérie, tu as vu juste, je suis débordée et souvent il y a des amis que j'oublie..mais loin du blog, n'est pas loin du coeur, saches le!!
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S
Pour l'instant juste un petit coucou pour te dire que je suis revenue, bon dimanche.
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